"L'éclairage du présent pour une relecture du passé"

Publié par Manuela Simula, le 26 octobre 2021   1.3k

Les 21 et 22 octobre derniers, Cap Sciences a accueilli le PREAC Archéologie, Outils et Investigation.

Environ 60 personnes, entre stagiaires -issu.e.s de l’éducation nationale, la culture et la médiation scientifique- et intervenant.e.s ont participé à cette formation qui a pour vocation de fournir des ressources et des outils pour une meilleure compréhension du fonctionnement et des enjeux des sciences archéologiques dans le cadre de l'éducation artistique et culturelle.

Portée par le Réseau Canopé, Cap’Archéo/Cap Sciences, la DAAC de l’académie de Bordeaux, la DRAC Nouvelle-Aquitaine et l’Inspe, en partenariat avec le PIP et l’Inrap, l’édition 2021 du Preac a souhaité proposer une réflexion autour de « L’éclairage du présent pour la relecture du passé » en prenant appui sur les liens entre débats sociétaux et recherche archéologique.

Une spécificité cette année : des ateliers de pratique mêlant art et sciences pour interroger des sujets d’actualité tels que l’environnement, le genre, la santé et la mémoire.

La formation s’est ouverte avec l’intervention de Jean-Paul DEMOULE, professeur émérite de Protohistoire européenne à l’Université de Paris I, membre de l’Institut Universitaire de France et fondateur de l’Inrap, qui s’est questionné sur la demande sociale concernant l’archéologie, sur la façon dont elle s’en nourrit et les réponse qu’elle peut apporter à des problématiques allant de l’évolution des groupes humains à la construction d’une identité et d'un roman national, en passant par les migrations, les rapports de domination et les inégalités.

Conférence inaugurale de Jean-Paul DEMOULE : "Archéologie et société(s) : Quels sont les impacts des débats sociétaux actuels sur la recherche archéologique ?".

Dans les ateliers de pratique, accompagné.e.s par un binôme scientifique-artiste, les participant.e.s ont pu s’interroger sur la thématique choisie, découvrir par l’expérience comment l’art et la science s’en saisissent, y répondent et se modulent réciproquement, et appliquer ces mécanismes de relecture dans la construction d’un projet de médiation scientifique et pédagogique.

Pour l’axe Environnement, le chercheur Bruno MALAIZE, paléo-océanographe et paléo-climatologue à l’Université de Bordeaux, Laboratoire EPOC – OASU, et l’autrice, conteuse et écrivaine Céline RIPOLL ont proposé un regard croisé sur les théories de l'effondrement de l'île de Pâques et la chute des Moaï. Une expérience partagée en direct entre deux continents qui a mené à la construction d’un conte réunissant apports scientifiques et approche sensible autour des traditions orales, berceau de la transmission polynésienne.

Atelier "Environnement" : Statues Moaï, plage d'Anakena, Parc national de Rapa Nui sur l’île de Pâques.

La thématique du Genre a été portée par la néolithicienne Anne AUGEREAU, archéologue à l’Inrap, et par Céline VERNEY, artiste plasticienne, spécialisée dans les reconstitutions hyperréalistes de personnages préhistoriques et historiques. Corps, attributs, gestuelles, mais également invisibilité, domination, répartition des tâches et du travail… comment traiter le genre en archéologie ? Nourri.e.s d’exemples concrets issus de la recherche en archéologie du genre, les stagiaires ont réalisé et mis en récit une interprétation archéologique de la société « genrée » actuelle à l’aide de matériaux plastiques différents.

Atelier "Genre" : Mise en situation : préparation des supports d'impression en argile pour la réalisation de panoplies "genrées".

Sur le thème de la Santé, avec Valérie DELATTRE, archéo-anthropologue à l’Inrap, et Sophie AGUSSOL, actrice, art-thérapeute et fondatrice de la MAATA de Bordeaux, les stagiaires ont questionné la perception de la différence, des corps empêchés et des personnes psychiquement en difficulté et ont construit et interprété des arguments contradictoires dans une série de débats mouvants.

Atelier "Santé" : Echanges brise-glace. Valérie Delattre revient sur l'histoire archéologique du handicap.

Pour le dernier atelier, Mémoire de l’esclavage, Patrice COURTAUD, anthropologue, membre du CNRS, laboratoire PACEA de l’Université de Bordeaux, et Sylvain SAVOIA, dessinateur-graphiste-illustrateur, auteur de BD, ont accompagné les participant.e.s dans la découverte de l’archéologie de l’esclavage coloniale et la réalisation de planches de BD pouvant raconter la vie des de ces esclaves oubliés à partir des données scientifiques. 

Atelier "Mémoire de l'esclavage" : Dessins préparatoires de Sylvain Savoia pour sa BD "Les esclaves oubliés de Tromelin".

Enfin, archéologie et art ensemble pour rendre visible l'invisible, l'oublié, le caché, l'effacé...

La soirée a été enrichie par la visite de l’exposition Esprit critique, détrompez-vous ! à Cap Sciences et la découverte des parcours du Musée d'Aquitaine Un égal, des égos et Collections du 18e siècle, ce dernier en compagnie de Nicolas Caraty, guide non-voyant.

Le lendemain, après une séance de speed pitching entre stagiaires pour partager l’expérience vécue et le débat impliquant public et spécialistes, la formation s’est terminée avec l’intervention de Pascal DURIS, professeur en épistémologie et histoire des sciences, Université de Bordeaux, Histoire des sciences et anachronismes.

Speed pitching : Echanges entre participant.e.s atour de mini tables rondes à l'issue des ateliers.

Deux jours riches et intenses, source d’échanges et de partages qui ont donné matière pour imaginer de nouveaux projets faisant dialoguer art et sciences archéologiques et dont nous gardons aussi une trace artistique grâce aux sketchnotes géants de Bertrand LEFEBVRE.

Exemple de réalisations en live scribing par le facilitateur graphique Bertrand Lefebvre.

Mais le Preac Archéologie ne s’arrête pas là ! Les ressources produites pour et pendant la formation seront disponibles sous peu sur le site de Canopé et nous nous retrouverons bientôt en Dordogne pour le volet Préhistoire du Preac porté par le PIP.