L'homme et l'animal : un sujet dénaturé ?
L’Homme et l’animal : un sujet dénaturé
Paléontologue, chercheur au CNRS, directeur du laboratoire PALEVOPRIM, Paléontologie Évolution Paléoécosystèmes Paléoprimatologie, université de Poitiers
Parce que nous sommes dotés de cinq sens imparfaits ne fonctionnant qu’à une certaine échelle, la perception brute que nous avons de notre univers est bien souvent inexacte, voire radicalement fausse. La terre n’est pas plate, elle n’est pas immobile dans l’univers, le soleil ne tourne pas autour d’elle et le temps ne s’écoule pas de la même manière en tout point de l’espace. Toutes ces perceptions naïves ont été invalidées par la méthode scientifique et certains progrès techniques. Au XXIe siècle, une éducation honnête permet donc à chacun de mieux connaître la réalité physique de la petite portion d’univers que nous occupons. C’est hélas beaucoup moins vrai pour la perception que nous avons de notre place dans la nature. Le concept d’une distinction fondamentale entre les “Hommes” et les animaux (« Nous par opposition à eux ») est profondément ancré dans notre compréhension du monde, dans nos langues, dans nos habitudes, dans nos croyances, dans nos lois, dans nos systèmes économiques et même dans nos travaux scientifiques. Pourtant, l’immense diversité des espèces animales et Homo sapiens sont unies par des ressemblances fondamentales sur le plan biologique : plan d’organisation, développement, physiologie, architecture cellulaire, génétique. L’humanité partage tout cela avec les autres espèces animales parce que notre histoire évolutive profonde est également celle des autres animaux et du vivant en général. Ceci s’applique également à notre comportement, bien qu’il soit fortement mis en avant pour nous distinguer du reste de la biodiversité. Il est donc impossible de définir, au cours de l’histoire évolutive de l’humanité, un point de rupture abrupt et définitif avec le reste du monde animal. Nous sommes donc des animaux parmi tous les autres et nous faisons partie de la biodiversité. Si le déni général de cette réalité s’atténue, on peut espérer que notre attitude vis-à-vis du reste du vivant change de manière fondamentale.
Collège Jean-Moulin, 8 rue Salvador Allende, Poitiers.
De 10:30 à 12:30